Malgré une percée dans les sondages de Fernando Haddad, candidat du PT adoubé par Lula, la possibilité de voir l’extrême-droite de retour au pouvoir au Brésil est désormais réelle. Annoncé perdant lors d’un hypothétique second tour contre Ciro Gomes (centre-gauche), Jair Bolsonaro battrait par contre le candidat du PT en cas de second tour contre ce dernier, ce qui semble pour l’instant l’hypothèse la plus probable. Cet ancien capitaine de l’armée brésilienne, ouvertement nostalgique du régime militaire qui a mis le pays sous coupe réglée pendant 2 décennies, s’est illustré par ses propos souvent machistes et homophobes. Sa campagne a mis en évidence le sentiment de déréliction d’une partie de la population brésilienne qui ne croit plus en ses dirigeants politiques et qui est confrontée à la crise économique et sociale (santé et écoles en berne) et à l’insécurité croissante. En définitive, de Budapest à Brasilia, de Rome à Paris, si l’on exclut la dimension de l’immigration, peu présente au Brésil, ce sont bien les mêmes sentiments d’abandon par un Etat de moins en moins providence qui poussent ceux qui se sentent sans voix si ce n’est celle des urnes, vers les candidats anti-système, qui sont souvent au Brésil de fait liés à un système qui s’auto-entretient (voir l’article de Serge Gruzinski). Favorable aux privatisations sur un plan économique, Jair Bolsonaro est partisan d’une ligne dure, conservatrice sur les plans sécuritaires et sociaux. Décidément, au Brésil, comme le dit Serge Gruzinski, « il faut que tout change pour que ne rien ne change ».
Brésil, que tout change pour que rien ne change
(Présidentielle au Brésil : Bolsonaro et Haddad en tête des intentions de vote)