Les opérations de police de grande envergure dans les favelas de Rio sont désormais monnaie courante. Quand les habitants et associations de défense des droits de l’homme dénoncent des atteintes flagrantes à ces mêmes droits, le gouverneur PSL, un proche de Bolsonaro, y voit une « action d’intégration urbaine ». La question en soi ne relève pas d’un simple paradigme sémantique mais bien d’un malaise profond de la société brésilienne, née dans la violence des massacres des populations amérindiennes, puis celle de l’esclavage. La notion de « guerre juste » a été reprise par la jeune république elle-même lors de la répression de guerre de Canudos, puis plus tard par le régime militaire et une part de la société civile qui voyaient à travers une répression et l’usage disproportionné de la force un moyen nécessaire pour arriver à « l’état de droit ». Le droit à la sécurité fait partie des droits de l’homme…tout comme l’égalité en droit. Or, c’est bien au nom d’un état de droit, d’une société pacifique et pacifiée que l’Etat, par le truchement de certains de ses représentants, va user d’une répression souvent aveugle pour « intégrer » ce qu’il considère comme des « zones grises » ou des « antimondes » selon l’acception du géographe Roger Brunet à la « ville ». L’utopie des UPP a hélas fait long feu pour de multiples raisons. Cette reconquête « par le coeur », pourtant couronnée de succès à ses débuts, a laissé symboliquement place à celle de l’armée, symbolisant une guerre et une rupture, comme celle qui faisait passer les troubles d’Algérie de problèmes intérieurs réglés par l’envoi de CRS, à ceux de « guerre ».